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Une preuve de la Résurrection

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La dĂ©monstration de la rĂ©alitĂ© de la rĂ©surrection se manifeste Ă  notre gĂ©nĂ©ration dans le Linceul de Turin, comme nous l’avons Ă©voquĂ© dans notre livre le Signe de Jonas, et expliquĂ© en dĂ©tail dans notre confĂ©rence Le Linceul vu par l’infographiste. 

Mais Jésus Christ apporte déjà une preuve de la résurrection des morts dans l’Écriture sainte, dans Luc et dans Marc, lors d’un débat avec les sadducéens. Pourtant cette preuve est rarement mise en avant. Elle est même très souvent négligée dans les sermons de nos prêtres lorsque la messe cite ces passages des Évangiles.

Pourquoi ?

Parce que, littĂ©ralement, l’argument prĂ©sentĂ© par JĂ©sus est trop souvent incompris. Et comme il n’est pas compris par ceux qui doivent l’expliquer, il n’a aucune chance de convaincre l’auditoire !

Relisons ce passage, dans Luc puis dans Marc :

Luc 20, 27 S’approchant alors, quelques SadducĂ©ens – ceux qui nient qu’il y ait une rĂ©surrection – l’interrogèrent

Luc 20, 37 Et que les morts ressuscitent, MoĂŻse aussi l’a donnĂ© Ă  entendre dans le passage du Buisson quand il appelle le Seigneur le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob.

Luc 20, 38 Or il n’est pas un Dieu de morts, mais de vivants; tous en effet vivent pour lui. »

Marc 12, 26 Quant au fait que les morts ressuscitent, n’avez-vous pas lu dans le Livre de MoĂŻse, au passage du Buisson, comment Dieu lui a dit: Je suis le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob?

Marc 12, 27 Il n’est pas un Dieu de morts, mais de vivants. Vous ĂŞtes grandement dans l’erreur! »

Effectivement, Ă  la première lecture, on ne voit pas comment JĂ©sus prouve qu’il y a une rĂ©surrection. L’Ă©pisode du Buisson Ardent ne prĂ©sente en effet aucun rapport avec la rĂ©surrection de la chair !
De leur côté, les commentaires des pères de l’Église ne nous éclairent pas beaucoup.
Relisons par exemple ce que disent Saint JĂ©rĂ´me, ThĂ©ophylactus, Bède et la Glose sur Marc 12,27 :

 S. JĂ©rĂ´me. VoilĂ  donc l’erreur oĂą les fait tomber leur ignorance des Écritures, car après la rĂ©surrection, les hommes seront comme les anges de Dieu, c’est-Ă -dire, il n’y aura plus ni mort, ni naissance, ni enfant, ni vieillard.

ThĂ©ophylactus. Cette mĂŞme ignorance leur fait commettre une autre erreur, car s’ils comprenaient bien les Écritures, ils y trouveraient des preuves Ă©videntes de la rĂ©surrection des morts: «Quant Ă  la rĂ©surrection des morts, continue Notre-Seigneur, n’avez-vous point lu dans le livre de MoĂŻse ce que Dieu lui dit dans le buisson», etc.

S. Jérôme. Je dis «dans le buisson», emblème de ce que vous êtes, car le feu le brûlait, sans consumer ses épines, ainsi vous êtes comme entourés des flammes de ma parole, et elles ne peuvent consumer les épines qui sont le fruit de la malédiction.

ThĂ©ophylactus. «Or, je vous le dĂ©clare, je suis le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob, comme s’il disait: «Je suis le Dieu de ceux qui vivent»; et il ajoute, en effet; «mais des vivants»; et remarquez qu’il ne dit pas: J’ai Ă©tĂ©, mais, «je suis» le Dieu d’hommes qui existent encore. Dira-t-on que Dieu ne parle ici que de l’âme d’Abraham et non de son corps. Je rĂ©ponds que la personne d’Abraham comprend ces deux choses, le corps et l’âme; Dieu est donc aussi le Dieu du corps qui vit en Dieu, c’est-Ă -dire, en vertu de l’ordre Ă©tabli de Dieu.

Bède. On peut dire encore que Notre-Seigneur, en prouvant que les âmes survivent Ă  la mort du corps (car Dieu ne pourrait point ĂŞtre le Dieu de ceux qui n’auraient jamais existĂ©), en vient par une liaison nĂ©cessaire Ă  la rĂ©surrection des corps qui ont participĂ© aux bonnes et aux mauvaises actions des âmes.

S. JĂ©rĂ´me. Ces paroles: «Je suis le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob», sont une dĂ©claration de la sainte TrinitĂ©. En ajoutant: «Dieu n’est pas le Dieu des morts», Notre-Seigneur nous enseigne l’unitĂ© de la nature divine. Or, ceux-lĂ  vivent qui se sont rendus maĂ®tres de la part qu’ils avaient choisie; et ceux-lĂ  sont morts qui ont perdu ce qui Ă©tait en leur possession; vous ĂŞtes donc dans une grossière erreur.

La Glose. En effet, ils se mettaient en contradiction avec les Écritures, et soutenaient des opinions injurieuses à la puissance de Dieu.

De saintes paroles, certes, mais qui, sur le plan logique, nous laissent plutĂ´t sur notre faim…

A la première lecture, dans Luc comme dans Marc, on se heurte en effet à un non-sens logique :
Dieu dit à Moïse qu’il est le dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Or tous les trois sont morts depuis longtemps lorsque Dieu s’adresse à Moïse depuis le buisson. Le fait que Dieu ait été le dieu de ces trois personnages ne constitue pas, en soi, une preuve de la résurrection des morts. Si le texte nous disait qu’ils apparaissaient à Moïse, soudainement ressuscités devant lui à côté du buisson, peut-être ; mais en l’occurrence ce n’est pas le cas !

Au contraire, si on se replace dans le contexte de l’Ă©poque, on trouve chez tous les peuples de l’antiquitĂ© des dieux des morts ou du royaume des morts ; Hadès, Nergal, Ereshkigal, etc… Évoquer les noms des illustres ancĂŞtres, mĂŞme s’ils ont vĂ©cu pour Dieu au cours de leur vie terrestre, ne constitue pas un argument en faveur de la rĂ©surrection. Le Dieu d’Abraham ou d’Isaac pourrait tout aussi bien ĂŞtre un dieu des morts autant qu’un dieu des vivants, puisqu’ils sont morts !

L’Ă©pisode de la transfiguration sur la montagne, oĂą JĂ©sus s’entretient avec MoĂŻse et Élie, en prĂ©sence de Pierre, Jacques et Jean, pourrait Ă  la rigueur constituer un argument valable : si trois personnes peuvent tĂ©moigner avoir vu JĂ©sus dialoguer avec MoĂŻse et Elie, pourtant morts depuis des siècles, alors il y aurait une preuve. Mais JĂ©sus avait enjoint ces trois tĂ©moins, Pierre, Jacques et Jean, de ne rien dire de ce qu’ils avaient vu ! … En plus, on peut toujours mettre en doute un tĂ©moignage puisque Thomas ne croit pas en la rĂ©surrection du Christ avant de l’avoir vu de ses yeux.

Alors, comment peut-on comprendre cette phrase ?

La clĂ© est certainement ailleurs que dans les personnes d’Abraham, d’Isaac et de Jacob…
J’ai longtemps tournĂ© autour de cette idĂ©e, interrogĂ© des thĂ©ologiens, des prĂŞtres, sans succès. Je n’avais droit qu’à des rĂ©ponses Ă©vasives ou non convaincantes. Mais le Ciel n’a pas voulu me laisser sur cette Ă©nigme. L’Esprit-Saint m’a rĂ©pondu par la bouche d’un Ă©vĂŞque inspirĂ© — bĂ©nis soient nos Ă©vĂŞques inspirĂ©s ! —, qui m’a mis sur la piste au dĂ©tour d’une conversation. Aussi, je m’empresse de partager avec vous la joie de cette rĂ©vĂ©lation…

 Voici donc comment nous pouvons comprendre ce passage Ă©nigmatique :

L’argumentation de JĂ©sus devant les SadducĂ©ens se situe en rĂ©alitĂ© sur un plan strictement logique et matĂ©rialiste. VoilĂ  pourquoi les pères de l’Église qui s’appliquent, dans leurs commentaires, Ă  approfondir le sens mystique des Écritures, ne nous avaient pas Ă©clairĂ©.
JĂ©sus connaĂ®t bien la doctrine des SadducĂ©ens, qui avaient une vision hellĂ©niste, matĂ©rialiste, du monde, et il va prĂ©cisĂ©ment s’appuyer sur un Ă©lĂ©ment de leur doctrine pour leur prĂ©senter un argument imparable qui dĂ©montre la rĂ©alitĂ© de la rĂ©surrection. Nous pouvons rappeler brièvement l’une des caractĂ©ristiques de la doctrine des SadducĂ©ens, selon ce qu’en dit saint Paul :

Actes 23, 8 Les SadducĂ©ens disent en effet qu’il n’y a ni rĂ©surrection, ni ange, ni esprit, tandis que les Pharisiens professent l’un et l’autre.

Les Actes des apôtres nous précisent ainsi que les Sadducéens ne se contentent pas de nier la résurrection, mais aussi qu’il n’y a pas d’ange ni d’esprit. C’est une information importante pour la question qui nous intéresse, car s’il n’y a ni ange ni esprit, alors pour les Sadducéens c’est nécessairement Dieu lui-même qui EST dans le buisson en feu !

Relisons le passage du buisson ardent pour mieux en comprendre les consĂ©quences :

Exode 3, 1 MoĂŻse faisait paĂ®tre le petit bĂ©tail de JĂ©thro, son beau-père, prĂŞtre de Madiân; il l’emmena par-delĂ  le dĂ©sert et parvint Ă  la montagne de Dieu, l’Horeb.

Exode 3, 2 L’Ange de YahvĂ© lui apparut, dans une flamme de feu, du milieu d’un buisson. MoĂŻse regarda: le buisson Ă©tait embrasĂ© mais le buisson ne se consumait pas.

Exode 3, 3 Moïse dit: « Je vais faire un détour pour voir cet étrange spectacle, et pourquoi le buisson ne se consume pas. »

Le texte de l’Exode dit que c’est « l’ange Â» de YahvĂ© qui est dans le buisson, mais nous comprenons que pour les SadducĂ©ens, qui ne croient pas aux anges, c’est Dieu lui-mĂŞme qui est le feu dans le buisson, et non la reprĂ©sentation de l’un de ses messagers.

Or, le texte nous dit deux fois que « le buisson ne se consumait pas », alors qu’il s’agit d’une « flamme de feu ». Notez bien la prĂ©cision du texte : comme souvent dans les Ă©crits hĂ©braĂŻques, les termes sont doublĂ©s (ici flamme + feu) pour ne laisser aucune ambiguitĂ©. Donc c’est bien d’un vrai feu de bois dont il s’agit et pas d’un effet de lumière qui aurait l’apparence de feu.

Et voilà la clé !

Si Dieu est le feu du buisson, et que ce feu ardent ne consume pas un arbuste sec — et rien ne brĂ»le mieux et plus vite qu’un buisson dans le dĂ©sert —, alors c’est que Dieu prĂ©serve la vie : il ne dĂ©truit pas la matière ! Il n’est pas le dieu de la corruption, de la dissolution de la matière, de la mort : au contraire, il est le Dieu de la vie.

Cet argument est absolument extraordinaire. On dirait une dĂ©monstration mathĂ©matique. Dans un contexte oĂą chacun a des doctrines diffĂ©rentes, des rĂ©fĂ©rentiels diffĂ©rents et mĂŞme une interprĂ©tation diffĂ©rente de l’Écriture, il Ă©tait impossible de s’entendre. Or JĂ©sus propose une passerelle logique, qui permet Ă  tout esprit censĂ© de le rejoindre et de partager son raisonnement. Pour le contredire, les SadducĂ©ens auraient pu rĂ©pliquer que le feu n’était pas rĂ©ellement Dieu, mais plutĂ´t une reprĂ©sentation de Lui, mais comme ils ne croient pas aux anges, ils ne pouvaient pas oser avancer cet argument ; ils cesseraient d’être SadducĂ©ens !

Bien chers prĂŞtres qui cherchez des idĂ©es pour prĂ©parer l’homĂ©lie du 32e dimanche du temps ordinaire annĂ©e C, si vous lisez ces lignes, n’hĂ©sitez pas Ă  vous en inspirer ! Notre monde est au moins aussi matĂ©rialiste que la vision qu’en avaient les sadducĂ©ens, et l’argumentation de Notre-Seigneur JĂ©sus-Christ est plus que jamais pertinente aujourd’hui…

I am Mother debunké

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Analyse critique du film I am Mother, distribué par Netflix

Les séries et long métrages produits ou distribués par Netflix sont connus pour véhiculer bien souvent une idéologie contraire aux valeurs catholiques. Des dizaines d’articles ont déjà été écrits à ce sujet.
Nous allons ici faire un dĂ©bunkage (mot contemporain pour dĂ©mystification) du film de science-fiction australien « I am mother » de Grant Sputore, avec Clara Rugaard et Hilary Swank, sorti en juin 2019. Cette production est très qualitative sur le plan technique. L’actrice principale, Clara Rugaard y est aussi convaincante dans son jeu d’acteur qu’une Natalie Portman au mĂŞme âge, et on peut lui prĂ©dire une belle carrière d’actrice. Le scĂ©nario post-apocalyptique est quant Ă  lui digne des grands noms de la science-fiction. Enfin, tous les effets spĂ©ciaux sont convaincants. Cette belle production sert pourtant le nouveau paradigme de promotion du nouvel ordre post-chrĂ©tien propagĂ© par la plateforme Netflix.

 « I am mother », dont le titre peut oralement sonner comme « I am other », signifie « je suis mère », et peut aussi vouloir dire en anglais « je suis autre ». Et effectivement, c’est l’histoire de la genèse d’une autre sorte de mère. De ce huis-clos post-apocalyptique Ă  trois personnages, deux humains et un robot dotĂ© d’intelligence artificielle, rĂ©unis dans un bunker hi-tech va sortir une nouvelle forme de mère : bien humaine mais totalement dĂ©humanisĂ©e.

L’histoire dĂ©bute avec la mise en incubation automatique d’un embryon humain dans une couveuse. Un robot humanoĂŻde conduit tout seul les opĂ©rations. Une succession de scènes montre ensuite le mĂŞme robot Ă©lever l’enfant comme le ferait une vraie mère : donner le biberon, chanter des berceuses, jouer, apprendre Ă  marcher, faire l’école, etc. Des tableaux parfois Ă©mouvants de cette surprenante famille monoparentale se succèdent, montrant l’enfant nourrisson, petite fille, puis adolescente.
Le contexte nous est expliquĂ© vers la 7ème minute du film : le bunker est une ferme d’Ă©levage d’humains, et le stock d’embryons humains congelĂ©s et l’intelligence artificielle qui supervise le fonctionnement ont Ă©tĂ© construits en prĂ©vision d’une apocalypse. L’histoire dĂ©marre après cette apocalypse : automatiquement, le robot a mis en route le protocole de repeuplement. Mais au lieu de dĂ©marrer l’incubation de tout le stock d’embryons, l’intelligence artificielle a commencĂ© par un seul enfant car, dit-elle « il faut du temps pour apprendre a ĂŞtre mère ». De l’aveu du robot, cet enfant est donc un test pour la machine, puisqu’il est destinĂ© Ă  parfaire l’expĂ©rience de l’intelligence artificielle.

Le robot-maman prĂ©sente l’aspect froid et impersonnel d’un engin militaire. Sa dĂ©marche rappelle celle des bipèdes de Boston Dynamics. Mais sa voix n’a rien d’artificiel : elle est tendre, affectueuse, d’un naturel tout Ă  fait humain. Et les attitudes et postures – mis Ă  part la dĂ©marche – sont celles d’une maman toute dĂ©vouĂ©e Ă  l’éducation de son enfant.
On remarque tout de suite que contrairement à la plupart des I.A., intelligences artificielles, des films de science-fiction, comme HAL dans 2001, l’Odyssée de l’Espace, ou Gerty dans Moon, celle-ci, curieusement, ne porte pas de nom. C’est « Mère », simplement. Quant à l’enfant dont l’embryon portait le matricule APX01, elle sera appelée « Fille » tout au long du film.
Ne pas nommer ces deux personnages revient Ă  en faire des individus universel.
A ce stade, on comprend donc qu’on est bien en présence d’un film à portée allégorique, comme le sont certains films de science-fiction, comme Matrix, Soleil Vert, Blade Runner et tant d’autres, et la suite de notre analyse va le confirmer.

A la dixième minute, lorsque « Fille » est adolescente, un Ă©pisode est censĂ© illustrer l’enseignement. Car « fille » va Ă  l’école… dans une classe vide, et oĂą « Mère » est le professeur. Mais la scène de l’Ă©cole est significative de l’idĂ©ologie Netflix, et mĂ©rite de s’y arrĂŞter. Le thème en est l’éthique en matière de transplantation.

On prĂ©sente Ă  « Fille » un cas particulier de besoin de greffe : cinq receveurs ont un besoin vital d’organes. Un donneur potentiel, malade mais guĂ©rissable, pourrait sauver les cinq autres malades mais, privĂ© d’organes vitaux, cela impliquerait de le tuer. La jeune fille est donc face Ă  un problème d’éthique : vaut-il mieux guĂ©rir le donneur malade, quitte Ă  ce que les cinq autres meurent, ou bien tuer le donneur pour sauver les cinq.
Évidemment, pour une intelligence artificielle sans émotion ni éthique, la question ne se poserait pas : tuer une personne malade mais guérissable pour prolonger la vie de cinq autres est la solution qui s’impose mathématiquement.
Le robot demande alors à « Fille » si, dans le cas où elle serait, ELLE, à la fois le donneur et le médecin, elle accepterait de donner sa vie pour sauver les cinq autres.
C’est censé être un cas de conscience : est-elle prête à se sacrifier pour l’intérêt du groupe ?
« Fille » répond qu’elle aimerait connaître les cinq autre patients pour savoir s’ils sont de bonnes personnes. En d’autres termes, elle revendique le droit de juger si ces personnes méritent de vivre ou non, si son sacrifice sert le bien ou le mal.
Le robot lui rĂ©torque que les humains ont tous un droit Ă©gal Ă  la vie, mĂŞme s’ils sont indignes, fainĂ©ants ou mĂŞme meurtriers, et que son Ă©lève doit relire les philosophes. A ceci « Fille » rĂ©pond que les philosophes se contredisent… ce qui est vrai !

Pourtant tous les deux ont tort : le spectateur doté d’un minimum d’esprit voudrait pouvoir leur répondre que la problématique est insensée ! En effet, si le donneur est lui-même le médecin, alors les six mourraient car le médecin qui sera tué par le prélèvement de ses propres organes ne pourra jamais faire la greffe sur les cinq autres !
Ainsi
dans le monde futur dépeint dans le film, tout comme dans notre avenir proche, l’intelligence et la sagesse n’existent plus : l’homme débordé par ses sentiments est incapable de faire les bons choix sans l’aide de la machine, seule capable de le raisonner.
Certains verront ici une illustration de l’entreprise d’abrutissement par les mĂ©dias : comme toujours, au lieu de faire appel Ă  la rĂ©flexion, on propose au spectateur un choix binaire entre l’émotion et la logique comptable. Il n’y a pas d’Esprit Saint pour insuffler le dĂ©sir de faire la volontĂ© de Dieu plutĂ´t que la volontĂ© du monde. L’humanitĂ© recréée en « Fille » est dĂ©pourvue de tout lien spirituel qui, seul, de prendre des dĂ©cisions qui rĂ©pondent aux commandements divins plutĂ´t qu’à des dĂ©sirs individuels ou collectifs, et qui servent Ă  faire le salut de l’âme.

A la dixième minute arrive l’évènement qui dĂ©clenche l’émancipation de « Fille » ; et qui va achever son initiation… Alors qu’elle regarde sur sa tablette un Ă©pisode enregistrĂ© de reality-show des annĂ©es 80 (… je me demande d’ailleurs bien pourquoi les rĂ©alisateurs ont choisi un show aussi dĂ©bile oĂą le propos est la tenue vestimentaire de Woopy Goldberg ? comme si le bunker destinĂ© Ă  prĂ©server le patrimoine culturel de l’humanitĂ© n’avait rien trouvĂ© de mieux, Ă  offrir en divertissement aux survivants d’une apocalypse… ), survient une panne de courant. « Fille » rĂ©pare et en trouve la cause : une souris qui ronge des câbles (autre parenthèse : si une simple souris peut faire dĂ©faillir toute l’installation du bunker, ça en dit long sur la fragilitĂ© du système ; mais passons, ce n’est peut-ĂŞtre qu’une faiblesse du scĂ©nario).
Aussitôt l’énergie rétablie, « Mère » s’empresse d’incinérer la souris vivante, par crainte de contamination.
« Fille » se demande alors si « Mère » lui dit bien la vĂ©ritĂ© sur la situation extĂ©rieure. Si une souris bien vivante a pu s’introduire dans le bunker, alors il y a peut-ĂŞtre de la vie dehors… et peut-ĂŞtre mĂŞme des humains. Elle profite alors du sommeil de « Mère » en train de recharger ses batteries pour aller jusqu’au sas. Et lĂ , bien opportunĂ©ment, elle trouve une survivante, blessĂ©e par balle, qui vient toquer Ă  la porte. « Fille » hĂ©site puis fait entrer l’étrangère.

Cette femme, dont l’âge avoisine la quarantaine, pourrait ĂŞtre la mère de « Fille ». Elle lui livre une autre version de la situation du monde que celle que « Mère » a racontĂ©. Selon cette femme, qui ne dit pas son nom — et d’ailleurs personne ne le lui demande, toujours dans un soucis d’universalitĂ© probablement — les robots sont les mĂ©chants : ce sont eux qui asservissent l’humanitĂ© et qui massacrent les hommes libres, façon Terminator.

A ce stade, « Fille » est en quelque sorte face à deux mères qui lui proposent deux visions, deux univers, deux projets :
– Choisir le monde aseptisĂ© du bunker et un projet de repeuplement dirigĂ© par une intelligence artificielle.
– Choisir le monde extĂ©rieur, inconnu et mystĂ©rieux, oĂą les hommes vivraient libres.

A laquelle de ces deux mères, « Fille » va-t-elle se fier ? Quel projet désire-t-elle vraiment ?
D’autre part, « Fille », tout comme Eve au pied de l’arbre interdit, est prise d’un doute : qui dit la vérité ? Mère ou l’étrangère ? Dieu ou le serpent ?
Le choix est d’autant plus difficile que rien n’est fait pour rendre l’étrangère particulièrement sympathique, ni Ă  « Fille » ni au tĂ©lĂ©spectateur : avec son look de survivaliste armĂ©e, l’Ă©trangère est sale, affamĂ©e, mĂ©fiante, agressive, prĂ©fère les opĂ©rations sans anesthĂ©sie, et en plus elle est anonyme !

La dimension mystique est mise en Ă©vidence une fois de plus. Alors que l’environnement du bunker est totalement athĂ©e, l’étrangère, elle, est ostensiblement chrĂ©tienne : blessĂ©e, elle rĂ©cite des Ave Maria et elle serre un chapelet dans ses mains, et dans son repère Ă  l’extĂ©rieur on dĂ©couvrira un autel dĂ©diĂ© Ă  Marie. Elle possède en outre dans sa besace un livre intitulĂ© « les Dieux de Mars ». C’est un ouvrage d’anticipation des annĂ©es 20 qui existe rĂ©ellement. Wikipedia nous apprend que dans cette histoire qui se passe sur la planète Mars, le hĂ©ro dĂ©nonce les fausses religions en usage sur la planète rouge.

Ainsi comme nous l’avons dit, l’Ă©trangère, humaine paraĂ®t au spectateur aussi dĂ©rangĂ©e et archaĂŻque que les humains des rĂ©serves sauvages d’Aldous Huxley dans le Meilleur des Mondes. Le robot, malgrĂ© son ambiguitĂ©, parait finalement plus humain, affable, adulte que cette femme au regard de bĂŞte traquĂ©e.

Bref, après quelque péripéties et la découverte que « Mère » a élevé d’autres filles avant « Fille » et qu’elle les a vraisemblablement tuées parce qu’elles ne correspondaient pas au projet totalitaire de l’intelligence artificielle, « Fille » finit par prendre « Mère » en haine et s’enfuit à l’extérieur avec l’étrangère.
Elle y découvre que la terre est stérile et que les seules cultures — industrielles — sont contrôlées par des machines associées à l’intelligence artificielle de « Mère » et défendues contre le pillage de survivants humains par une armée de robots tueurs. En gros : le monde réel de Matrix !
Loin de l’introduire dans une communautĂ© de survivants, l’étrangère lui rĂ©vèle que l’humanitĂ© est fourbe et cruelle et lui propose de vivre seule avec elle, cachĂ©es, dans un container sur une plage isolĂ©e du bout du monde, près des restes d’un porte-container Ă©chouĂ©. On y remarque un autel avec des statuettes de la Sainte Vierge, un chapelet, des dessins de Marie.

Visuellement, c’est un naufrage. Ce projet de vivre en survivaliste traquĂ©e, qui doit voler du maĂŻs dans les fermes robotisĂ©es ou consommer les conserves rouillĂ©es que renferment les cales du navire Ă©chouĂ© n’enthousiasme guère « Fille ». Et on la comprend ! Elle regrette d’avoir suivi cette femme archaĂŻque, qui aurait pourtant pu finir son Ă©ducation de mère selon la chair et lui transmettre d’autres valeurs… S’ensuit une dispute, et « Fille » la gifle avant de retourner chez sa première « Mère » artificielle : celle du bunker !
Elle est reçue par l’armĂ©e des robots gardiens de « Mère » qui l’accueille avec bienveillance comme le père du fils prodigue dans les Évangiles accueillait avec amour l’enfant qui lui revient après avoir fait l’expĂ©rience du monde. « Mère » lui propose le projet d’élever elle-mĂŞme le second enfant de l’Ă©levage : un mâle cette fois, de type africain.

Paradoxalement, « Fille » tue le robot « Mère » juste après que cette dernière lui ait expliquĂ© que le robot qui lui sert de corps n’est qu’un vĂ©hicule, et que l’intelligence artificielle qui contrĂ´le le bunker contrĂ´le Ă©galement les robots extĂ©rieurs et les machines qui cultivent et produisent la nourriture. Ainsi le meurtre de cette mère virtuelle n’est-il que symbolique : « Fille » achève son initiation en tuant l’enveloppe de celle qui lui a donnĂ© la vie et qui l’a Ă©levĂ©e, mais paradoxalement elle se place sous sa domination, qui est immortelle, elle.

D’ailleurs, l’intelligence artificielle finit le travail et se dĂ©barrasse dĂ©finitivement de sa concurrente : grâce Ă  un mouchard cachĂ© dans le sac de la survivante, elle trouve la cachette oĂą elle vivait paisiblement, y envoie un robot… et la tue (après l’avoir probablement torturĂ©e pour lui faire avouer les caches des autres survivants, comme cela est suggĂ©rĂ©).

La machine a parfaitement rĂ©ussi son but : après avoir dĂ©vastĂ© la terre et rendu les hommes dĂ©pendants de la technologie, elle est parvenue Ă  produire une nouvelle gĂ©nĂ©ration mĂ©tissĂ©e (le second enfant Ă©levĂ© est noir), rĂ©gie par ses loi eugĂ©nistes, qui rejette d’instinct ses ancĂŞtres nĂ©s naturellement, et qui se prive du coup de toute transmission authentique de foi et de culture. On retrouve lĂ  tous les codes du nouvel ordre post-chrĂ©tien.

Mais la machine a aussi atteint ses objectifs dans l’esprit du public. En effet, contrairement au film Matrix, oĂą le spectateur pouvait moralement soutenir la rĂ©sistance Ă  ce projet de dictature numĂ©rique en suivant le très charismatique NĂ©o, dans I am Mother au contraire tout est conçu pour prendre le parti de la frĂŞle et courageuse « Fille » qui est pourtant l’esclave consentante et manipulĂ©e de l’intelligence artificielle.
Cette inversion des valeurs, devenue presque systématique dans les productions Disney depuis une dizaine d’années et de plus en plus courante dans les séries et long-métrages diffusés actuellement, peut être vue comme une préparation des esprits à l’acceptation d’une religion à l’envers.
Singeant Jean-Baptiste qui a préparé les hommes à la venue du Seigneur, la voix qui court sur les réseaux des nouvelles plate-formes de diffusion numérique annonce inlassablement le règne prophétisé — court mais dévastateur — de l’ennemi de l’humanité.

La culture cinĂ©matographique est un bon moyen d’exercer notre intelligence, d’observer et de produire des rĂ©flexions. L’apostolat peut s’exercer de multiples façons : parler de cinĂ©ma et relever les valeurs antichrĂ©tiennes que promeuvent certains films peut ĂŞtre une forme d’apostolat. Sachons donc en profiter avec discernement et transformer ces productions en opportunitĂ©s d’évangĂ©lisation.

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